dimanche 30 juillet 2017

Ecrire un texte à partir d'une même syllabe déclinée dans une dizaine de mots ...




Natacha sortit vers dix heures de sa datcha : elle allait faire quelques achats à l’épicerie de ce brave M. Charkov. Chacun sait que M. Charkov a tout. Bien achalandé est son chalet-magasin. On y trouve viande, poisson, légumes  et bien sûr du vin. C’est pourquoi Natacha fit l’emplette de deux tranches de cachalot. Elle se faisait une joie de les préparer pour midi avec de l’échalote, le tout arrosé de Chably. Mais au repas, tout chavira : le cachalot n’était pas frais : au bord de la nausée, Sacha, le mari de Natacha, recracha tout. Et dans l’affaire qui s’en pourlécha ? Le chat.

Fantasio


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Mylène fait sa mijaurée devant le marmiton en lui faisant miroiter mille espoirs. Elle agitait son miroir et ses mythiques mitaines qui laissaient le marmiton mi-figue mi-raisin devant sa marmite mijotant des myrtilles …
Ziza


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« Barnabé revient sur le terrain et arrête de batifoler ! »

Le jeune joueur quitta précipitamment l’orée du bâtiment et sa supportrice au splendide balcon.
Arrivé sur le terrain, il se jeta sur le ballon, précédemment balloté entre ses co-équipiers. Pris d’une banane qui ravit son entraineur, il se précipita vers le gardien de but. Malheureusement, un tacle balaya son ardeur. Cette baffe donnée à son orgueil déclencha une bagarre générale. L’entraineur rugit tels un shebab :
« Arrêtez de vous battre ! Vous l’aurez voulu, ce soir ce sera rutabaga pour tout le monde ! »


Juan

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« A table ! » s’écrira tata Tabatha. Nous dévalâmes les escaliers en tas pour nous entasser autour de la bonne tarte chaude de Tabatha et d’une tasse de chocolat chaud. « Tabernacle, s’écria Samantha, je me suis tâché ma jolie robe jaune. » Les gamins attablés s’esclaffèrent. « Cessez donc de la tarabuster » s’écria Tabatha, tandis que fusaient à voix basse toutes sortes de mots interdits : « Tartufion, bâtard, tartignole… » « Taratata, si ça continue, vous n’aurez plus de tarte à la rhubarbe », se fâcha Tabatha, attachée aux bonnes manières. Il n’en fallait habituellement pas plus pour rappeler les enfants à l’ordre, mais cette fois il était trop tard : il ne restait déjà plus une miette de la bonne tarte de tata Tabatha.

Agnès-Sarah


Un produit alimentaire qui a marqué votre enfance



Quand je rentrais de l’école, une délicieuse odeur de sauce tomate parfumait le couloir.

Je posais mon cartable et j’allais à la cuisine et selon un rituel immuable, je coupais des petits morceaux de pain que je laissais ramollir dans ce mélange onctueux, qui cuisait à feu doux, dans la casserole.

Puis je les prélevais, les laissant refroidir dans une assiette, pour ne pas me brûler la langue.

Je soufflais dessus, pour  raccourcir l’attente, puis au bout de quelques minutes, je pouvais enfin les goûter.

Les saveurs de l’oignon, du sel et de la tomate avaient imbibé et ramolli la mie, alors que la croûte restait plus ferme.

Il fallait que je sois raisonnable. Ma mère préparait le dîner, et faisait cuire dans cette sauce, selon le jour de la semaine, des coquillettes au potiron, ou du mérou, ou des œufs et des poivrons.

La cuisine de ma mère était incomparable. Toute la famille le reconnaissait.

Elle mettait à préparer ses plats une application, un sens du détail, une exigence de perfection, qui ne faiblissait jamais.

Elle qui avait grandi dans une famille pauvre où la nourriture avait souvent manqué, elle avait appris à en faire des merveilles.

Chantal

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Au commencement (nous étions très jeunes), il y eut la « panade » ou soupe au pain qui permettait de nous faire boire du lait, à mes frères et à moi, tout en finissant le pain. Puis du temps passa. Et, à mi-chemin entre le riz et le lait, vint le temps de la soupe au tapioca. Petits grains blancs qu’il s’agissait de verser dans du lait bouillant tout en surveillant de près la cuisson. Une seconde d’inattention et tout débordait, noyant la casserole et la gazinière. Quand, enfin, la soupe était prête, c’était un pur bonheur de souffler sur le mélange en voyant briller les billes du tapioca. Comme nous ne plaignions pas le sucre, cette soupe-dessert était toujours la bienvenue, accueillie par des sourires ou des « encore, encore ! », dès que nous avions fini notre portion.
Fantasio


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Il est tout rond. Tout rouge. Il croque sous les dents et pique la langue tout en explosant  en bouche de son sucre aromatisé à la fraise chimique.

Vous devinez de quoi il s’agit, n'est-ce-pas ?

De la fraise Tagada, bien sûr !

Ce bonbon, très à la mode à la fin des années 70 / début des années 80, que ma grand-mère nous donnait chaque jour à 13h15 après le déjeuner quotidien pris en famille et juste avant de dévaler la côte pour rejoindre l’école du village, était notre rendez-vous quotidien avec frères et sœurs chez notre grand-mère paternelle qui habitait dans la ferme d'en face.  

Cette petite fraise artificielle était un délice ! Nous avions pris cette douce habitude que nous n'aurions manquée pour rien au monde ...

Aujourd'hui, je réalise que cette fraise chimique n'était qu'un prétexte pour passer un court moment avec notre grand-mère adorée! C'était un petit moment du quotidien, tout simple, auquel on ne prête guère attention...et avec le temps, on se rend compte que ce court instant de vie, c'était un instant de bonheur.

Au fond, je n'ai jamais vraiment aimé cette fraise industrielle, même encore aujourd’hui. Mais je ne peux croquer dans une fraise Tagada sans penser à ma grand-mère chérie!...

Ziza


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Il est une alliance de produit, 
Des bouchées qui nous anoblissent.
Des pommes de terre bien coupées, 
Des carottes réduites en dés, 
Des oignons parfaitement cuisinés, 
Un filet de porc venant l'enchanter.
 
Un amour sincère vous faisant mijoter.
Voici un Nikujaga parfaitement exécuté. 

Grand-mère, tu ne cesseras jamais de me manquer.


Juan



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Quel produit alimentaire a pu marquer mon enfance ? Sans doute, en cherchant bien, en trouverai-je quelques uns. Je pourrais citer en vrac les carottes, les petits pois, les potées à base de viande bouillie et de légumes, le chocolat du matin, les tartines beurrées, les biscuits secs, eux aussi, absorbés durant le petit déjeuner. En fait, il y en a beaucoup à bien y réfléchir et dire que l'un d'eux m'a marqué en particulier me semble difficile. C'est durant l'enfance que je découvris mon aversion pour les abats (elle dure toujours) et ma peur des brocolis (mais à présent j'en mange avec plaisir) et ma passion pour reconstituer l'alphabet avec des pâtes en forme de lettres sur le bord de l'assiette. Au-delà, ayant toujours considéré avant tout le caractère utilitaire de la nourriture, aucune, en particulier, n'a laissé dans mon esprit de trace durable, mais aucune ne m'a traumatisé non plus, sans doute parce que l'on m'a toujours laissé le choix de décider.


Gérard


Ecrire un texte à partir de ces 3 images en tentant de prendre de la distance par rapport à son style habituel ...



Elle ne nous l’avait pas dit, Cécilia, que cette région d’Auvergne que nous traversions en car, elle la connaissait très bien. Nous étions quinze dans le car, riant, chantant, tout à le joie de ces premiers congés payés. 1936 était vraiment notre année. Nous avions laissé à Aubervilliers ou Levallois nos soucis habituels. Les paysages se succédaient, somptueux, pour de pauvres citadins comme nous. A un moment, Raoul a fait arrêter le car pour nous prendre en photo, un par un. Des souvenirs ! Cécilia portait une sorte de sombrero bien qu’elle ait des parents espagnols et non mexicains. On est remonté dans le car, André, Paul, Raoul…et tous les autres et Cécilia. Et moi qui essayais en vain de changer de place pour me rapprocher d’elle. Quand nous sommes passés en bas de ce piton rocheux, surmonté d’un village fortifié, j’ai vu Cécilia tressaillir puis se cacher les yeux. Quand elle a retiré ses mains, des larmes coulaient encore.

Qu’avait-elle connu dans ce village, qu’avait-elle vécu ? Je ne le saurai sans doute jamais.

Gérard


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1954. Je suis cette femme  au chapeau mexicain qui pose adossée à la rambarde du belvédère. Dans la brume, on y devine une petite bourgade dans le fond. C’était une courte halte avant d’aller gravir cette jolie montagne surmontée d’un vestige médiéval.

Non, je n’étais pas au Mexique en voyage de noces mais en Auvergne avec tous les jeunes de mon village que le curé de la paroisse emmenait chaque année en voyage à la découverte d’une région française. Cet été-là, c’était l’Auvergne qui avait été choisie par le curé.

Nous partions un mois entier, à parcourir une région de village en village avec notre vieux bus qui avait dû faire plusieurs fois le tour de la France avec le curé au volant !

Ces périples régionaux et estivaux ont marqué des générations entières de mon village natal. Il faut dire que l’on appartient à une époque où les familles qui partaient en vacances étaient rares ! Seuls quelques bourgeois de la bourgade avoisinante avaient la chance de quitter la verte campagne du Jura. Nous autres, petits paysans, n’avions guère d’autres loisirs en été que le ramassage des foins sous un soleil de plomb ! Ce furent mes seules vacances jusqu’à mon mariage.

Cette année-là en Auvergne, j’ai rencontré l’homme qui allait devenir mon mari quelques mois plus tard. Nous étions logés chez les paroissiens des villages qui nous offraient le gîte et le couvert une nuit ou deux. C’est dans une maison qui nous a accueillis que vivait Henri.

Sur la photo prise au belvédère, on y devine le village d’Henri. J’étais loin de me douter au moment de la pose, que ma vie allait basculer quelques heures plus tard en croisant le regard de cet auvergnat…
Ziza



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Par ce matin de juillet, un car de la guardia civile s'arrêta devant la porte de mes parents. Aussitôt, la place du village s'éveilla d'une folle agitation. Le poissonnier habituellement concentré à faire oublier l’odeur de son poisson éventé, en oublia même les touristes perdus dans ses filets. Ceux-ci s'échappèrent aussitôt tels des brochets effarouchés. Même le coiffeur occupé à dissimuler le sommet abandonné de notre cher député, lâcha ses ciseaux en s’exclamant : "Par les frisettes de ma chère tante Félicité !"


La porte de la camionnette s'ouvrit, un garde bedonnant en descendit d'un pas mal habille. À le regarder, on ne pouvait se douter que son service venait de commencer et qu’une bouteille d’un alcool saisit la veille, l’aidait à affronter la pesante chaleur. Notre fier représentant de la loi, s’efforçant d’être à la hauteur de son rôle, s’avança d’un pas de cabot vers notre maison. Ma mère ouvrit un volet, elle avait compris ce qui allait se passer. Mon frère Jusépé rêveur invétéré, porté par les idées de l’international était partie il y a un an faire la guerre en Europe. Rongé par le chagrin et l’attente de ses nouvelles, l’échoppe de mes parents tenait volet fermé. Depuis, les dernières nouvelles du front étaient absolument abominables. Nous nous attendions au pire, jusqu’au moment où le vieux garde annonça les bras levés vers le ciel : « Mme Ricardo, je viens vous annoncer le mariage de votre fils en Espagne ! »

Juan
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Vingt ans. Elle avait vingt ans, un large sourire ravageur et un grand chapeau qui rappelait ses origines : Maria venait du pays du soleil, des pyramides mayas et des plages de sable fin.
Nous nous étions rencontrés il y a un an très exactement, sur la muraille de la citadelle de Passen-Hoffen, où mon régiment avait été envoyé en mission.
Son grand chapeau et sa longue jupe noire volant au vent détonnaient dans ce paysage bavarois. L’image de cette beauté surplombant la vallée de mon enfance m’avait saisi. Son père, diplomate, était en voyages d’affaires, sa famille l’avait accompagné. Et moi, il suffit de quelques mots prononcés en allemand de sa voix d’hirondelle aux « r » chantants pour tomber amoureux.
Ce furent alors les trois jours les plus heureux de ma vie. Il lui fallait échapper à la vigilance de son père et moi à celle de mon général, et la nuit, tous deux délivrés de nos autorités hiérarchiques, nous courions dans les rue tels des gamins et nous embrassions langoureusement sous les porches comme les stars du grand écran.
Mais ce bonheur fut de courte durée. La mission de son père à Passen-Hoffen s’acheva et il fallut se dire adieu. Mon hirondelle retournerait à ses pyramides et moi à mes entraînements.
Mais c’était sans compter sur la fougue et la témérité de la belle. Le dernier soir, elle me glissa solennellement une lettre dans la main avant de s’enfuir. J’ouvris, elle mettait résolument mon amour à l’épreuve : « Si vous m’aimez, retrouvez-moi ici même sur cette citadelle qui vit naître notre amour, dans un an, jour pour jour, heure pour heure. Alors, si vous avez dit vrai, vous vous agenouillerez et me passerez la bague au doigt, pour ne plus jamais nous quitter. » Je restai coi, comme pétrifié, ne sachant si je devais pleurer son départ ou craindre la fougue d’une jeunesse pleine d’élans innocents mais excessifs. Qu’en serait-il dans un an ? Peut-être m’aurait-elle déjà oublié en réalité ? Ou moi sans doute ? Certes elle était belle avec son charmant petit corsage blanc qui lui cintrait merveilleusement le buste et la poitrine, ses lèvres douces et sa main délicate et tendre, mais de là à m’emprisonner pour la vie !

Pourtant un an plus tard, jour pour jour et presque heure pour heure, j’étais dans le bus, le cœur battant, qui me menait à Passen-Hoffen. Je riais de ma propre bêtise, lorsque je crus apercevoir, de la fenêtre de l’autocar, niché sur la muraille, un grand chapeau rond aux allures d’El dorado.
Agnès-Sarah

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Les ruines d'un château se situaient sur une hauteur
C'était une sorte de montagne aux parois abruptes inspirant la peur.
Dans le lointain, un car de touristes progressait en roulant lentement
Le ruban asphalté se développait selon un tracé sinueux à ce moment.
Le véhicule maintenait un rythme régulier et quelque peu cahotant.
Mais à aucun moment son moteur fatigué ne donna de signe de faiblesse.
Un bruit continu se faisait entendre lors de sa montée en roulant.
Quant à moi, je me trouvais déjà sous les murs
Tout à coup, l'image d'une femme vêtue d'une robe apparut dans le lointain.
Je la fixais intensément , fixant mon attention sur ses yeux d'un bleu pur.
Un grand chapeau lui couvrait la tête, elle ne prononça aucune parole, pas un mot.
Et j'étais devant elle, la voyant se préparer à faire le grand saut ;
Je voulus l'empêcher de sauter dans le vide sans fin qui s'étendait là devant nous,
C'est à ce moment que j'ai ouvert les yeux me demandant si je n'étais pas fou.
Quelle apparition avais-je entrevue dans cette sorte de cauchemar.
Il me fallait me lever, car si je restais dans cet état , alors ce serait le cafard.
Je me suis rappelé plus tard de trois images anodines
Elles m'avaient pourtant marqué , je ne sais pourquoi, elles me rappelaient quelque chose ;


Allons, il me fallait éloigner ma pensée de tout cela pour ne pas dépasser la ligne.

Gérard

dimanche 16 juillet 2017

Comment déchiffrer les tâches d'une coccinelle ?





Je me promenais au milieu des roses de mon jardin, embaumant l’air de leur parfum délicat et suave. Je les observais et les caressais avec une joie mêlée de fierté, prenant le temps de parler aux unes et aux autres pour leur témoigner mon affection et mon admiration.
            Alors que je caressais un joli bourgeon jaune prêt à éclore, vint se poser sur ma main une charmante coccinelle, chatouillant de ses menues pattes mes doigts. Quatre gros pois noirs se dessinaient sur son dos bien rouge et bien rond. Je levai ma main et soufflai délicatement sur elle afin de l’inviter à reprendre son vol, car il paraît que l’on peut alors faire un vœu. Mais usant de toutes les forces que lui prodiguaient ses minuscules pattes, à mes doigts elle restait bien accrochée.
            Elle remonta le long de mon bras, provoquant sur son passage de légers frissons, puis évolua sur ma poitrine, mon cou, et déterminée poursuivit son chemin sur mon visage. Elle ne voulait plus me quitter. L’amitié qu’elle me portait était bien manifeste et je lui offrais de bon cœur l’hospitalité qu’elle me réclamait.
Lorsqu’elle atteint ma chevelure, je vis le bourgeon qui l’avait vu naître et me l’avait confiée me sourire. Je connais bien mes fleurs et les aime de tout mon cœur, chacune d’elle possède sa couleur et sa personnalité bien à elle, je devine leurs secrets, et leurs envies qu’elles me confient silencieusement, mais jamais encore je n’avais vu un tel sourire sur un bourgeon.
Je m’approchai de lui étonnée pour mieux observer le prodige. C’est alors que je l’entendis me susurrer à l’oreille : « La coccinelle te fait le cadeau du message que tout va bientôt renaître dans ta vie. La coccinelle est symbole de transformation et de renaissance. Il y a aujourd’hui pour toi un pois pour chaque dimension : physique, émotionnel, intellectuel et spirituel.
Je restai ébahie.

La coccinelle revint se poser sur le bout de ma main et de son perchoir m’observa. J’eus l’impression de plonger mon regard au-dedans d’elle tandis qu’elle lisait au fond de mon âme. Je déposai alors sur elle un doux baiser plein de gratitude et dans un battement d’ailes plein  de grâce elle me laissa à mon ravissement, s’envolant porter des messages d’amour et d’espoir en d’autres contrées.

Agnès Sarah


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En observant la coccinelle, on voit qu'elle est dotée d'un certain nombre de points noirs , ou qui nous semblent l'être, sur le fond rouge de sa carapace. Ce charmant insecte, après un déjeuner de pucerons en vient donc à éclairer le tableau d'ensemble de ses élytres colorées. On s'interroge sur le signifiant profond des dits points. Il y en a qui prétendent que les Bêtes à bon Dieu n'ont pas toujours le même nombre de points, que c'est une donnée variable, mais en fait qui le sait vraiment. En tout cas les charmantes bestioles sont une aubaine pour nos rosiers. Elles sont donc sensibles au parfum des fleurs et aiment être belles en harmonisant le rouge et le noir bien que rien ne vienne prouver qu'elles lisent Stendhal. Bon, cela ne me dit toujours pas ce qu'elles cherchent à signifier. On peut imaginer un subtil éclairage à base de lumière noire et qui exprimerait des sentiments ou encore des prises de position devant tel ou tel événement de la vie ; Ceci est une possibilité ; cependant aucune coccinelle n'en a jamais rien confié, car il semble qu'elles ne soient pas très loquaces , ce dont on ne s'étonnera guère.

Gérard

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Le petit Antoine ne tenait plus en place ! Depuis que son malicieux grand-père lui a conté comment les uraniens comptaient venir sur terre et qu’ils allaient nous le faire savoir au moyen des petites tâches des coccinelles, il en avait perdu l’appétit et voyait la petite bête à bon dieu partout ! Antoine était précoce : il avait appris à lire presque tout seul et faisait la lecture à ses camarades de petite section. Sa maîtresse en était enchantée !Seulement voilà : l’alphabet des coccinelles était une matière autrement plus élaborée que les hiéroglyphes qui firent la renommée de Champollion !
Après l’appétit, le sommeil s’en alla aussi. Au petit matin, Martine, la maman d’Antoine, passait l’éponge sur les dessins de tâches aux formes oblongues souvent entourées d’équations différentielles qui achevaient de l’inquiéter.
Gérard, un voisin entomologiste fut convié à donner son avis sur le mal d’Antoine, mais il ne put que rester muet une journée entière à observer le petit garçon.

A l’heure du goûter, Antoine repartit en souriant, une énorme part de tarte au chocolat en main et s’écria : j’ai trouvé maman !! J’ai trouvé : les tâches de coccinelle essaient de nous dire depuis 2 millions d’années que jamais elles n’ont été des bêtes à bon dieu !

Ahmed



Rencontre avec un autre monde ...



J’étais vraiment fatiguée. Un an que je n’avais pas pris de vacances, et j’en avais bien besoin. En un an, tout avait basculé dans ma vie : rupture sentimentale, remise en question professionnelle, deuil parental. J’arrivais à un moment dans ma vie où j’avais l’impression d’avoir toujours fait fausse route, où je ne savais plus rien, où tout semblait à balayer et à reconstruire. Besoin de repos, d’introspection, de revenir à moi-même. Besoin de solitude pour faire le point.
            Je trouvai à louer sur airbnb une charmante maisonnette en bois au milieu de la forêt. Trois semaines de tête-à-tête avec moi-même, ne pouvant être dérangée dans ce duo solitaire que par le chant des oiseaux et le brame des cerfs, c’était ce qu’il me fallait. Juste quelques livres dans ma valise, de quoi écrire, et de bonnes chaussures pour marcher et explorer mon intérieur au fond des bois.
            Je passai ainsi les trois premières journées à marcher sur les sentiers désertés avant de m’octroyer de longues nuits ressourçantes. Il me semblait quelquefois reconnaître dans le souffle du vent des chants humains, comme des mélodies venues d’un autre monde qui m’appelaient et me berçaient.
            Le quatrième jour je m’écartai du sentier habituel et plongeai plus profondément dans la forêt. Je marchai assez longuement, et bien que je n’ai jamais eu grand sens de l’orientation, je gardai une curieuse foi en ma capacité le moment venu à retrouver mon chemin. Au bout de sans doute plusieurs heures de marche, j’arrivai à une clairière, délicatement bercée par le son d’un ruisseau. Une étrange lumière étincelante semblait s’en dégager. J’aperçus alors, comble de stupéfaction, une sublime licorne au pelage blanc, arborant fièrement une majestueuse et longue corne sur son front altier. Un halo aux couleurs de l’arc-en-ciel l’enveloppait.
            Je crus rêver. Je me frottai les yeux, peut-être était-ce une illusion d’optique, mais il n’y avait plus à douter, ce n’était pas un cheval sauvage, c’était une somptueuse, infiniment délicate licorne, magique créature toute droit d’un conte de fées pour enfants.
            Elle tourna son regard vers moi et m’observa, ne paraissant ni étonnée ni perturbée le moins du monde par ma présence. Puis elle s’enfonça lentement au milieu des fourrés. L’idée me traversa qu’elle m’invitait à la suivre. Je m’engageai donc dans ses pas. Et en effet, elle se retourna, comme pour vérifier que je la suivais bien. Sur la terre encore humide de longs filaments argentés se remémoraient le passage de la licorne.
            La belle créature m’emmena ainsi jusqu’à un lac dont je n’avais vu la trace sur aucune carte. Arrivée à destination, elle se retourna une dernière fois vers moi, me contemplant de ses yeux profonds et sages, et s’engagea dans le lac, aussi mystérieusement qu’elle était apparue.
Je n’y comprenais rien.
Je quittai mes vêtements un à un, et les abandonnant sur la berge je plongeai à mon tour, entièrement nue dans la vaste étendue aquatique. Je plongeai et nageai sous l’eau, ouvrant les yeux à la recherche de la licorne disparue. Qu’était-elle devenue ? Mais elle demeurait invisible. Je la cherchai encore un long moment, avec l’espoir et la patience d’un archéologue à la recherche de trésors enfouis. Mais alors que j’allais finalement m’avouer vaincue, je vis une femme sortir de l’eau, une somptueuse chevelure dorée tombant jusqu’à son bassin, arborant une longue robe d’une blancheur éclatante dans laquelle se mirait l’astre de nuit. « Bienvenue à toi chère sœur. Te voici enfin de retour à la maison. Cela fait longtemps que nous t’attendons, à Avalon. »
J’eus alors l’impression de revenir à une réalité bien connue mais oubliée après un très long sommeil. Émergeant d’un lointain souvenir sans âge, je reconnus la Dame du Lac.

Agnès Sarah


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En me promenant, d'accord ce n'est pas très original, mais ce furent les circonstances qui en décidèrent ainsi, je l'ai rencontré comme ça, par hasard, au détour d'une rue donnant sur un canal. Il était assis, un peu éloigné du bord de l'eau , il ne prononçait pas une seule parole et ne bougeait pas non plus un seul masque de son visage, formant un tout immobile ; je me contentais de l'observer de loin . Je suis allé m'asseoir moi aussi en m'efforçant de pas perdre le contact avec lui. J'aurais pu tenter de comprendre les choses , que pensait-il, qu'écoutait – il quelle voix lui parlant à lui était au-delà de nous , au-delà de tout, dans une totale incapacité à communiquer quoi que ce soit à qui que ce fut . Son autisme avait quelque chose d'impossible à évaluer. Je pense qu'il aurait pu rester ainsi pendant des heures sans qu'il ne se passe rien. Qu'avait-il trouvé ou compris , quel malheur l'avait frappé , car il n'était pas heureux, cela se voyait. Son regard semblait éteint alors qu'il observait un point imaginaire situé à l'horizon. C'est alors que je me suis levé, de toute façon, qu'aurais-je pu lui dire. Quant à lui, il est resté alors que je m'éloignais sans me retourner. Notre seul point commun , en cet instant, c'était d'être tous les deux. Les eaux du canal continuaient leur chemin en clapotant.

Gérard

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Sainte-Anne en ce 1er novembre 2018 : des bourrasques de pluies et de feuilles arrachées à la boue du parc s'engouffraient par le portail de l'hôpital. 
Pas une âme censée pour résister à cette violence! Presque : un petit homme trapu, presque jovial, venait de redessiner des rectangles en échelle que la bourrasque précédente venait d'effacer. Une, deux, trois ...
"Ici la porte du paradis. Ici j'évite l'enfer!" disait-il aux éléments qui couvraient sa parole.
Sautillant d'une case à l'autre, le petit bonhomme exultait de pouvoir braver un tel temps. A chaque fois que le vent effaçait sa marelle, la joie qu'il éprouvait à la redessiner s'en trouva décuplée.
La pluie, le vent et ses hurlements n'étaient qu'un compère de jeu ... Et le jeu était d'autant plus jubilatoire qu'il fallait recommencer!
Il faisait froid en ce début novembre! L'épuisement fit place à l'allégresse, la crispation au sourire ...
Deux ombres parurent soudain, comme inquiètes et inquiétantes!
"Enfin, le voilà!" dit l'une des ombres, il joue encore à la marelle mais il est transis de froid.
Les deux ombres s’emparèrent chacune d'un bras et le soulevèrent comme pour lui épargner de traîner dans la boue. "Rentrons vite!". Le petit bonhomme agité s'écriait : "Encore une fois, encore une fois! Laissez-moi encore essayer! Je n'ai pas réussi à franchir les portes du paradis!".

Ahmed


samedi 1 juillet 2017

Cette année où mon père ne vit que mon côté droit…





Quand j’atteins l’âge de douze ans, mon père devint subitement un con. Avant c’était plutôt quelqu’un de bien, un père attentif et aimant, un mari attentionné et fidèle, un employé consciencieux et soigné. Mais le jour de mes douze ans, il devint tout à coup un sombre con. Je ne sais comment cela au juste survint ni le pourquoi du comment, mais tout ce qu’il disait désormais ne valait rien et tout ce qu’il faisait était nid à déchet.
Mon père devenu subitement un con, je résolus de ne plus lui parler. Dès qu’il apparaissait, je tournai le visage de côté, sa vue même m’était devenue abjecte. L’évitant ostensiblement, il ne pouvait ainsi voir que mon côté droit. Cela sembla d’abord le gêner, mais comme il était devenu con, il finit par s’y faire et ne plus se poser de questions.
Le premier problème survint lorsqu’à force de tourner la tête en sa présence je finis par attraper un bon torticolis. Mon cou resta si bloqué que finalement tout le monde autour de moi ne vit plus que mon côté droit, dans une forme de solidarité traîtresse à l’égard de mon père, ce con ! Je profitai alors de la situation pour accumuler tous mes boutons d’acné sur mon côté gauche, devenu presque invisible.
Mais les professeurs de mon collège se plaignirent à mes parents qui reçurent une lettre de l’établissement. Ils considéraient comme une preuve d’insolence mon désir manifeste de ne pas suivre les cours et d’observer plutôt systématiquement ma voisine de gauche. Elle était jolie, c’est vrai, mais moi je préférais celle qui se mettait toujours dans le fond. Malheureusement, mon cou bloqué, je ne pouvais jamais la regarder.
Il fallut trouver une solution. J’allai chez le kiné qui rééduqua mon cou. Mais mon père étant resté con, je ne voulais toujours pas le voir ni lui parler.
Je résolus donc de baisser systématiquement le nez en sa présence. Mais passant désormais mon temps à mes pieds contempler, je me prenais sans cesse portes et murs dans la figure, ce qui n’est guère plaisant.
Il fallut à nouveau trouver une solution. Elle apparut alors lorsque mon père, tout compte fait vexé par mon attitude, résolut désormais de lever les yeux en l’air dès que j’apparaissais. C’est vous dire si c’est un con !


Agnès Sarah

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Contrainte cachée : partager une émotion très personnelle

Nul besoin de voyager pour rencontrer deux mondes totalement opposés.
Cette expérience m’a bouleversé, aux portes de notre cité
Lorsque le père du pays prospère rencontre le père du pays en guerre.
Nul mot ne peut transcrire à quel point nous sommes identiques.
Lorsque tu t’es avancé pour une autre bouteille de lait.
La nuit étant longue, ton fils a commencé à pleurer.
Nul besoin pour toi de la demander, nos regards se sont croisés.

Cette misère tu étais loin de la porter, ta dignité m’a profondément transpercé.
Tes quelques mots me marqueront à jamais : « Nous avons quelques soucis à régler ».

Juan



Ce nuage est un imposteur



Ce concept me semble bien vaporeux, tout serait là, à portée de main, sans y être vraiment. Un peu comme le sac magique et sans fond dont j'ai lu l'histoire dans les contes de mon enfance. D'un simple geste, pouvoir faire apparaître une image oubliée, faire résonner un orchestre majestueux, voir surgir du néant toute une bibliothèque. Comment tout cela serait-il possible ? Est-il vraiment envisageable qu'une chose soit en même temps ici et ailleurs ? Que sans trajectoire déterminée, elle saute d'un point à un autre. Une telle interférence dans nos vies quotidiennes aurait-elle un sens ou n'est finalement qu'un nouvelle illusion, une autre façon de nous enfermer dans un théâtre d'ombres qui masque la réalité. Une caverne au moins ça a des contours bien clairs, ce qui en fait une prison plus saine qui ne cherche pas à cacher sa nature.

Alors que ce nuage numérique prétend tout nous offrir pour mieux nous enfermer, nous espionner, nous formater dans un moule aussi rigide que nébuleux. Ce n'est qu'un imposteur.

Antoine 

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Tout comme ce qu’essaye de me faire croire mon père, avec son côté droit, si rationnel,
Loin de mes fredaines et marivaudages.
J’aime apprécier la Pluie, Torrents, Temps non cléments.
Il pleut, il pleut,
Comme à Berlin, ces temps-ci.
On peut nager sur les trottoirs !!! Merci les pluies torentielles.


Rien de « plu(ie) » savoureux que la pluie !
Les nuages sont les meilleurs amis,
Avec Compère Soleil,
des Jardiniers.
Que j’aime ce non-clément du Ciel.


Métaphore de la Vie aussi.
Les personnes qui ont tout réussi m’emmerdent !
Me lassent !
J’aime les pourris,
les « comme moi », quoi,
qui s’en prennent plein,
au Kilo,
des Contrecoups de la Vie.
Difficulté, incapacité, douleur, échec, décrépitude.
Plus on parle d’ennuis à la tonne, plus je les aime.


Pourquoi ?


C’est si simple !
Les ratés, les « en difficulté », les paumés, les « handicapés », les échecs redoublés,
Ils savent
AIMER
Autrement.
C’est un peu comme les vacances dans les vacances.
On vit des drames,
On se plante,
On croit que tout est fini…
Et en fait…
L’Ami du Temps nous invite à autre chose,
Après avoir essuyé maints drames et marées,
Décrépitudes crépitantes,
On savoure AUTREMENT,
On aime bien plus que DOUBLEMENT.


Plus vous peinez, plus vous apprécierez, n’est-il pas ?
J’y crois !
En tout cas, dernièrement, ça marche.


Promis, un jour, j’irais danser
Avec les Migrants,
Avec les ratés,
Avec les paumés,
Avec ceux qui ont eu de grandes difficultés,
Entre ceux, sortis de situations difficiles,
On se comprend, on s’entend,
On sourit, même sous pluie,
On rigole, entre ratés.


Pourquoi ne pas danser ensemble ?
D’ailleurs, je cherche un Club !

Marieke


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Contraintes cachées : les éléments du ciel et la 3°, 6°, 9° et 12° strophes débutent par ET


Ce nuage est un imposteur

La pluie joue à la petite fille
Et le vent chaparde la pomme
Les bruits s'enivrent de couleurs
Le ciel ne veut plus sortir de sa cage
Et le tonnerre boude derrière la porte
Le soleil s'impatiente devant la misère
Tandis que l'orage s'endort au pied de l'olivier
Et à cet instant un cri déchire les étoiles
Tout se fige et s'immobilise
Les éléments sont pétrifiés de frayeur
Et la lune insolente ricane en montrant ses dents jaunes et acérées ...

Ziza


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Contraintes cachées : placer un démonstratif (adjectif ou pronom) dans chaque phrase et intégrer l'autre proposition dans le texte

Nous pique-niquons au bord de cet étang. L’herbe est de ce joli vert qu’affectionnent en général les promeneurs ou ceux qui font le choix d’y étaler une nappe. Cerises, tomates-cerises, fromage et jambon, plus ces quelques quiches faites main, tout va bien.
Marion rayonne, Rémi rigole, Jérôme a ce visage rosé de celui qui a déjà goûté les apéritifs. Justement, on y est : Kir pour la plupart et bière pour cette chère Virginie qui ne supporte que la brune, de préférence belge. On s’installe donc, dans le désordre, sous ce ciel impassible, d’un bleu absolu.
Aucune ombre, aucun nuage, si ce n’est, soudain, une masse qui envahit notre horizon. Mais ce nuage est un imposteur : il n’est ni blanc, ni gris annonciateur de pluie, il est noir et vrombissant, multiple, stridulant des centaines de taons qui le composent.
Cette panique à bord, cette fuite un peu partout !
Et plus on court, plus on se débat, plus ce danger s’aggrave. Quelques-uns finissent recroquevillés sur eux-mêmes, avec la tête de ceux qui se réveillent d’une nuit gâtée par un horrible cauchemar.
Le nuage a tourné bride, il s’éloigne peu à peu et l’air retrouve ce calme qui nous avait tantôt séduits. On respire, on se réinstalle tant bien que mal et ce pique-nique redémarre. Rémi prend la parole : Je vais, commence-t-il, vous raconter cette année où mon père ne vit que mon côté droit…

Fantasio

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Ce nuage que je remarquais dans le ciel avait une nature déconcertante ; je dois dire que je n'aime pas les nuages qui ont cette particularité. Il me semble qu'ils tentent d'être ce qu'ils ne sont pas, ou, si ils le sont , il émane d'eux une volonté de se faire passer pour quelque chose d'autre sans aucun rapport avec ce qu'ils peuvent être en réalité, avec leur vraie nature.
Ce nuage a l'allure d'un cumulus d'été, mais qui sait s'il ne cache pas une plus sombre réalité. Peut-être nous prépare – t – il un orage ; il est certainement d'une nature imprévisible, il cache une vérité plus profonde, bien plus sinistre sans doute.
Ce nuage est donc dans l'imposture, puisqu'il se fait passer pour autre chose ; ainsi , en nous faisant croire qu'il est un cumulus d'été. Mais qui peut jurer qu'il n'est pas un affreux cumulo nimbus en gestation se réservant le moment propice pour nous arroser d'une de ces pluies d'orage d'une rare violence dont il a le secret.
Les nuages imposteurs sont dotés d'un état d'esprit tordu ; ils nous cachent une vérité en essayant de nous faire croire autre chose, ce qui est le propre d'un imposteur. On peut aussi s'interroger sur les conséquences de ces intentions. Cela peut être déstabilisant, pour ne pas dire inquiétant. Il est donc un imposteur déstabilisant et inquiétant qui se fait passer pour ce qu'il n'est pas et qui dissimule une vérité profonde et effrayante.

Gérard